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FIN DE DISCUSSION ENTRE COCTEAU ET JOUHANDEAU LORS D'UN REPAS CHEZ ELISE.
Texte
(Propos recueillis auprès d'Henri Rode le 3 novembre 2003).
Ainsi, continua de conter Cocteau à Jouhandeau : " Cette histoire
mettait en scène l'époustouflante américaine de Paris, Miss Barney dite
l'Amazone et son ami le critique raffiné Remy de Gourmont. Gourmont,
atteint d'une grave dermatose au visage, s'était lui-même interdit le
salon de sa grande amie, rue Jacob. Désolée de cet ostracisme
involontaire de sa part, Miss Barney eut cette idée : faire porter à
Gourmont dans un Vase de la Renaissance italienne, incrusté d'or, ses
propres urines, jugées souveraines par elle pour soigner les maladies de
peau. " - " C'est vrai, s'écria Marcel, tu connais la suite : Miss
Barney remettait ce vase à un valet de pied, chaque semaine, lequel le
portait de sa part à de Gourmont immensément reconnaissant. " - " Exact,
selon Max Jacob, dit Cocteau. Gourmont s'imbibait religieusement
l'épiderme de cette mixture sublime à ses yeux. N'est-il pas l'auteur
des " Lettres à l'Amazone " où il voue son âme à la richissime étrangère
? Las ! conclut Cocteau, il ne semble pas que cette médication, pour le
moins inattendue, ait fait grand effet. " Jean ajouta : " Je trouve
l'histoire magnifique et bien digne de la Venise des doges ! "
" Ah ! " termina le cinéaste de la " Belle et la Bête " : " Si Miss
Barney proclamait sa préférence des femmes sur les hommes, elle savait
s'y prendre avec ses admirateurs ! "
C'est encore au cours de ce duo vocal qui rejoignait le mimodrame, que
Cocteau lança à Marcel : " Pas un comme notre Max Jacob, pour raconter
des histoires où le merveilleux se mêle au religieux, au baroque voire à
l'atroce. "
Didier Mansuy